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Mrs Hislop, la Reine Victoria de la littérature anglaise
Success story. Tous les romans de cette Anglaise, qui vit entre Chelsea et la Grèce, sont des best-sellers : le premier, « L’île des oubliés », a ainsi conquis plus de 600 000 lecteurs en France ! Le prochain, « La Ville orpheline » se déroule à Chrypre et sort le 7 mai en France.
(Françoise Monnet, Le Progres)
« À force de voyager, je me sens de plus en plus fière d’être Londonienne, j’apprécie ma ville comme si j’étais une touriste ». Au British Museum où elle nous fait visiter une exposition sur le corps dans la Grèce antique, Victoria Hislop, en effet, s’épate et s’émeut. « Elle est belle, n’est-ce pas ? », devant une statue bien gironde d’Aphrodite. Aphrodite, tiens, c’est à une lettre près le prénom de l’héroïne du quatrième roman qu’elle publie depuis « L’île des oubliés » : « La Ville orpheline » (voir encadré), dont l’action se déroule à Chypre et qui caracole déjà en tête des ventes en Angleterre. « L’idée de ce roman remonte à 1977. Alors étudiante, je suis partie pour un grand voyage de six semaines en Grèce. Nous étions les premiers touristes anglais dans le nord de l’île, à Famagouste, depuis l’invasion par la Turquie en 1974. C’était très étrange, cette ville balnéaire en ruine, désertée par ses habitants… Il y a huit ans, j’y suis retournée avec mon éditeur, c’était toujours une ville fantôme et j’ai senti tellement de colère et d’émotion que j’ai commencé à écrire mon livre là-bas ».
Au restaurant l’Élysée, sur Hammersmith Road, tout en picorant une feuille de vigne, Victoria tire le fil d’Ariane de sa passion grecque. Depuis six ans, elle vit six mois par an à Agios Nikolaos, en Crète, où elle est devenue une star. Car c’est là-bas que tout a commencé. « Je ne m’intéresse pas tellement à l’archéologie, alors, quand j’ai découvert dans un guide sur la Crète où nous y étions en vacances avec mon mari et mes enfants, une petite île abritant un ancien hôpital qui a accueilli des lépreux entre 1903 et 1957, j’ai eu un déclic et décidé d’écrire un roman sur cette histoire ». Ce fut « L’île des oubliés », qui, après avoir eu du mal à trouver un éditeur (un hôpital ? La lèpre ? Bof), s’est vendu à plus de deux millions d’exemplaires et a été adapté, en Grèce, en série télé. Du jour au lendemain, la journaliste free lance, collaboratrice du Daily Telegraph, est devenue romancière à succès et a publié depuis, avec le même succès, « Le fil des souvenirs » et « Une dernière danse ». Aucun ne se déroule en Angleterre. « L’idée de génie de Victoria, c’est d’écrire des romans très documentés et en même temps très accessibles, avec un contexte historique. En Angleterre, ses romans sont une fenêtre sur le monde et c’est cela qui plaît à son lectorat, qui attend chacun de ses livres avec impatience », explique son agent à Londres, Laurence Laluyaux. Tandis que Victoria l’Anglaise va retourner à la bibliothèque de Saint-James Square pour travailler sur son prochain roman, dans quelques semaines, c’est Victoria la Grecque qui rejoindra la Crète pour faire la fête et le plein d’huile d’olive. « Ici, je suis disciplinée et je travaille, là-bas, je vais puiser mes idées ».
Sympathique schizophrénie.

La Ville orpheline
Été 1972. La ville de Famagouste, à Chypre, héberge la station balnéaire la plus enviée de la Méditerranée, cité rayonnante et bénie des dieux. Un couple ambitieux ouvre l’hôtel le plus spectaculaire de l’île, Le Sunrise, ou Chypriotes grecs et turcs collaborent en parfaite harmonie. Deux familles voisines, les Georgiou et les Özkan, sont de celles, nombreuses, venues s’installer à Famagouste pour fuir des années de troubles et de violences ethniques dans le reste de l’île, ou la tension monte.
Lorsqu’un putsch grec plonge l’île dans le chaos, celle-ci devient le théâtre d’un conflit désastreux. La Turquie envahit Chypre afin de protéger sa minorité sur place, et Famagouste est bombardée. Quarante mille personnes, n’emportant que leurs biens les plus précieux, fuient l’armée en marche.
Qu’adviendra-t-il du Sunrise et des deux familles restées dans la ville désertée?
A lire dans la presse
« Mrs Hislop, la Reine Victoria de la littérature anglaise. Tous ses romans sont des best-sellers : le premier, L’Île des oubliés, a conquis plus de 600 000 lecteurs en France ! »
Françoise Monnet, Le Progrès
« Une petite cantate qui chante doucement la Méditerranée, la famille et un passé qu’on connaît mal. »
Le Point
« Fascinant et émouvant. La description de Chypre et de ses habitants est inoubliable. »
The Times
« Tous ceux qui ont aimé L’Île des oubliés vont adorer La Ville orpheline. »
The Sunday Times

Les états d’art de Victoria Hislop
Depuis son premier roman, « L’île des oubliés », vendu à plus de deux millions d’exemplaires à travers le monde, elle est à la littérature britannique ce que son compatriote Ken Loach est au cinéma. Férue d’histoire, la romancière revient avec «Une dernière danse» son troisième récit, sur fond de guerre civile espagnole.
Propos recueillis par Fanny del Volta pour Point de Vue
Je vis entre la Grande-Bretagne et la Grèce, où je donne beaucoup de conférences. Aujourd’hui, je parle le grec au point d’en avoir oublié le français que j’ai appris dans ma jeunesse. Cela fait trente ans que je suis tombée amoureuse de cette terre. J’ai une maison en Crète, où je passe le plus clair de l’été. Là-bas, je nage plusieurs fois par jour. Puis je me plonge dans des recherches occasionnées par les divers voyages que je fais dans la région. Bien sûr, je lis aussi beaucoup de romans que je n’ai guère le temps d’ouvrir lorsque je suis à Londres. Prochainement, j’emmènerai avec moi le dernier William Boyd. C’était mon ancien professeur de littérature à Oxford. Nous sommes devenus amis, et j’ai l’habitude de lire chacun de ses ouvrages. Il vient de signer Solo, une nouvelle aventure de James Bond. Parfait pour mes vacances !
Le Festival de flamenco de Londres, qui se déroule chaque année sur la scène du Sadler’s Wells, est l’un de mes rendez-vous préférés. Il s’étire sur trois semaines et permet d’applaudir de grands noms de la danse et de la guitare, comme Sara Baras ou Miguel Poveda. Cet événement est si populaire à présent qu’il faut réserver ses billets bien à l’avance si l’on veut y assister. Les musiques traditionnelles me plaisent. Elles sont une façon de s’imprégner de l’atmosphère d’un pays. Pour mon dernier roman, je n’ai cessé d’en écouter. Cette danse passionnée et libre me parle bien plus que le classique.
Lorsqu’un film me plaît, je n’hésite pas à le revoir. La Grande Bellezza, de Paolo Sorrentino, n’a pas fait exception. Ce film est un vrai festin pour les yeux. D’une manière générale, j’aime le cinéma quand il n’a rien d’hollywoodien. Les happy end, très peu pour moi. Je suis plutôt du genre à aimer La Vie d’Adèle, d’Abdellatif Kechiche, ou Melancholia, de Lars von Trier. Deux chefs-d’œuvre.
J’habite en plein South Kensington, à Londres. Ce quartier regorge de musées. J’aime, par-dessus tout, les expositions d’art contemporain. À la galerie Serpentine, j’ai découvert Adriân Villar Rojas. Son travail s’intitulait Today We Reboot The Planet. Les œuvres de ce plasticien revêtent un caractère organique. Ses ambiances sont presque apocalyptiques. Son regard est celui d’un archéologue imaginant comment les civilisations futures percevront notre génération. Non seulement l’idée est brillante, mais le résultat se révèle d’une grande beauté,
Mes goûts musicaux sont assez éclectiques. Le seule genre qui ne m’attire pas est le rap, que je ne trouve pas très musical. Les paroles dominent trop les morceaux, Tous les jours j’écoute de la musique de discothèque pour faire de la gymnastique. Je n’ai pas trouvé d’autre moyen d’être assidue! Lorsque j’ai envie de chanter, je pense tout de suite à une ballade d’Elton John que je trouve d’une grande douceur : Your Song. Un jour, alors que j’étais invitée sur un plateau de la télévision grecque, on m’a demandé de la chanter. Eh bien, je l’ai fait, et du début à la fin !
La Canadienne Alice Munro me touche beaucoup. Auteure de nouvelles, essentiellement, elle possède une grande maîtrise du tragique, et son style révèle une observation scrupuleuse des comportements humains. Sans chercher à faire pleurer son lectorat, elle le projette dans des récits amorcés de façon abrupte et le rend vulnérable, d’autant qu’elle ne laisse aucune forme d’espoir à ses personnages. Dear Life est l’un de ses recueils les plus subtiles.
Je porte un regard très optimiste sur l’existence et cela rejaillit sous ma plume. L’imagination et surtout la curiosité permettent de visiter toutes les époques de l’Histoire. Cela me passionne. Mes personnages principaux, généralement aux étapes charnières de leur vie, sont sur le point de faire une découverte sur le passé de leur famille et de leurs origines. Il est impossible de trouver le bonheur sans parvenir, à un moment ou un autre, à une véritable compréhension de ce qu’ont vécu nos ancêtres.


Dernier tango à Grenade
Victoria Hislop a tout d’une grande. La preuve avec ce troisième roman à succès
Critique paru chez Elle, juillet 2014
VICTORIA HISLOP est une étrange auteure de best-sellers. Elle écrit par culpabilité. Parce qu’elle se sent une Occidentale privilégiée qui doit témoigner des souffrances du passé. En 2001, journaliste de tourisme, spécialisée dans les reportages ensoleillés, elle a une révélation en Grèce. Sur l’île de Spinalonga, elle apprend qu’il y avait autrefois une léproserie. « J’ai éprouvé le besoin de comprendre les drames vécus sur cette terre. » Ce sera « L’Ile des oubliés », son premier roman, livre magistral et succès international qui fera d’elle une icône en Grèce. Pour son nouveau roman, les choses se sont passées de la même manière. En reportage à Grenade, en Espagne, pour un article sur le flamenco, elle tombe en arrêt devant la statue du poète Federico Garcia Lorca, assassiné par les fascistes en 1936. « J’ai eu une illumination. Je ne pouvais pas rester une touriste britannique jouissant du soleil et insensible au passé. Il fallait que je remonte le temps. Qu’aurais-je fait à la place des Espagnols pendant la guerre civile ? » Résultat : « Une dernière danse », un roman qui mêle avec sa maestria habituelle la petite histoire – un amour impossible – et la Grande Histoire – celle des hommes -, cruelle et impitoyable. La famille Ramfrez va se déchirer pendant la guerre d’Espagne, chacun des frères prenant parti pour un camp – républicains ou fascistes -, tandis que Mercedes, leur sœur, passionnée de flamenco, est séparée de celui qu’elle aime, un guitariste gitan. L’ensemble est remarquablement mené, avec un sens du tempo, du drame, de l’empathie, qui n’appartient qu’à elle. Et comme d’habitude chez Hislop, il y a un secret familial. « A 30 ans, j’ai moi-même appris que j’avais une sœur aînée, morte avant ma naissance à l’âge de 3 ans. Mes parents me l’avaient caché ! Cela a bouleversé ma vie. » L’écrivaine a compris pourquoi elle avait toujours eu l’impression d’être un peu étrangère à l’existence, elle qui ne se sent pas du tout anglaise. Ainsi va Victoria Hislop qui tente de renouer le « fil des souvenirs » et qui ligote ses lecteurs au passage.