l’Express: « Victoria Hislop, nouvelle Byron »

Passionnée par l’histoire de la Grèce, l’auteure anglaise du best-seller L’Ile des oubliés publie son neuvième roman, La Statuette, sur fond de dictature des colonels et de trafic d’œuvres d’art antiques.

C’était un matin de confinement, début 2020. Victoria Hislop reçoit chez elle, à Londres, un coup de fil du Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis. « J’ai tout de suite reconnu sa voix, atypique, avec une pointe d’accent américain, nous raconte la romancière britan – nique, attablée à la cafétéria du musée des Arts cycladiques d;Athènes. Il me dit qu’il veut me faire citoyenne d’honneur de Grèce pour services rendus au pays, et notamment pour avoir promu l’histoire et les traditions de la Grèce à l’étranger. ]’étais éberluée, et flattée. Deux mois après le confinement, j , ai été reçue en grande pompe à Athènes par le Premier ministre et la présidente de la République Ekaterini Sakellaropoulou, une femme formidable. »

Dans la foulée, Victoria Hislop acquiert un passeport grec. Très pratique pour faciliter ses allers et retours entre l’Angleterre et sa seconde patrie, notamment la Crète, où elle a acheté une belle maison. Tout cela, elle nous en fait part dans la langue de Molière, perfectionnée grâce au compagnon français de sa mère. Décidément, la diplômée d’oxford, qui parle également grec, n’est pas une Britannique comme les autres … Et la voilà à la tête de son neuvième roman, La Statuette, publié quasi simultanément à Londres et à Paris et bientôt à Athènes. Un roman – fleuve, où elle mêle la grande et la petite histoire, le politique et l’intime, fractures sociales et fresques familiales – c’est sa marque de fabrique – sur fond de dictature des colonels et de trafic d’oeuvres d’art antiques.

Star mais pas diva pour un penny. Ce qui frappe, lorsqu’on rencontre la native de Bromley, c’est sa simplicité et sa gentillesse, jamais avare d’un cadeau comme nous l’indique Sarah Rigaud, la directrice éditoriale des Escales, son éditeur français. Et pourtant. Des millions d , exemplaires à travers le monde, dont deux pour la seule France, une trentaine de traductions … Les chiffres affolent depuis la parution, en 2005, de L’ile des oubliés (2012 en France), le roman qui a bouleversé la vie de la journaliste Victoria Hislop.

Petit rappel : en 2001, en vacances dans le nordest de la Crète, la Britannique découvre l’existence d’une petite île forteresse, Spinalonga, où des centaines de lépreux ont vécu, confinés, jusqu’en 1957, afin de ne pas infecter la population. Elle enquête, son imagination s’enflamme, succès planétaire de L’ile des oubliés, dopé par son adaptation en série par la télévision grecque. Depuis, elle enchaîne les romans « grecs », n’hésitant pas à aborder les périodes les plus sensibles de la République hellénique comme dans Ceux qu , on aime ( 2019), consacré à la guerre civile qui a embrasé le pays à la fin de l’occupation allemande, avec l’affrontement du gouvernement royaliste et des militants corn – munistes de 1946 à 1949. « On m’a dit: « N’écrivez pas là-dessus, il n’y a pas assez de recul.» J’ai insisté, et j’ai rencontré effectivement beaucoup de familles divisées, mais mon roman n’est pas binaire, il y a eu des horreurs des deux côtés … Et de nombreux jeunes Grecs m’ont remerciée de leur avoir fait découvrir ces pans de leur histoire. »

Rebelote aujourd’hui avec La Statuette. Cette fois-ci, elle s’attaque à la dictature des colonels (21 avril 1967-24 juillet 1974), à la corruption de ses dignitaires et au pillage des oeuvres d’art à travers l’histoire d’Helena la rouquine, fillette anglo-grecque envoyée en vacances chez ses grandsparents athéniens lors de Pété 1968. Dans le luxueux appartement du quartier Kolonaki, avec vue sur le Parthénon, le grand-père, le général Papagiannis, fait régner l’ordre – elle apprendra plus tard qu , il supervisait les lieux de détention des opposants à la dictature militaire et qu , il se faisait payer ses services (promotion d’un fils, transfert d’un autre) en statuettes et autres trésors antiques.

Les étés se succèdent, les grands-parents meurent, Helena, étudiante à Oxford, participe à un chantier de fouilles sur l’île de Nisos, dans les Cyclades, en compagnie de son petit ami, le sémillant Nick Sémillant mais plutôt louche, le jeune homme. Bientôt, !’enamourée déterre le pot aux roses, le pillage de Nisos et un trafic auxquels elle n’aura de cesse de mettre un terme, taclant les maisons de ventes aux enchères de Londres, peu regardantes sur la provenance des oeuvres. Tout comme Victoria, qui milite activement pour la restitution des bas-reliefs du Parthénon d, Athènes conservés depuis deux siècles au British Museum.• « De nombreux jeunes Grecs m > ont remerciée de leur avoir fait découvrir